Auteure, comédienne, metteuse en scène, Delphine Hecquet sait prêter l’oreille à la naissance de la parole, à la fragilité et aux hésitations du langage, à tout ce que les non-dits et les demi-mots révèlent de notre histoire et de notre intimité. Après Les Evaporés écrit en 2015 au Japon sur les phénomènes de disparition volontaire et Nos solitudes (2020), qui invitait à travers les souvenirs d’enfance à tracer l’itinéraire de nos identités incertaines, elle creuse ici le sillon du drame intra-familial en faisant écho à son premier texte - le huis-clos carcéral Balakat (2012) - dans une relation mère-fille ébranlée par la violence conjugale. À l’origine de Parloir donc, un fait divers : une femme emprisonnée pour le meurtre de son mari, un mari violent une vie durant. La pièce s’inscrit dans le temps d’une visite au parloir, celle de sa fille de dix-neuf ans. Ce jour-là, la jeune fille évoque la scène de crime à laquelle elle a assisté, se heurtant au silence, à l’incompréhension, à la distance qui la sépare de sa mère. La parole minutée détermine un rapport au temps problématique, précipité et comme distendu par la présence continue de la contrebasse. Au-delà du fait divers, Parloir explore les plis du langage, les hasards de l’oralité qui guident les échanges, esquissent une rencontre, amènent autant de réponses que de bouleversements, de silences. Par le choix du dialogue, une porte s’entrouvre vers une possible réparation.